Chouette, j’m’a trompé ! Ou accepter l’erreur pour éviter l’échec

Un article de Canissimo, rédigé par Yannick ! Bonne lecture 🙂

C’est une maladie très commune sur les terrains d’éducation canine : la  peur de l’échec (j’ai cherché en vain le terme scientifique, genre defectophobie, ça aurait fait plus classe, mais bon…).
Mais souvent, pour éviter l’échec, on voudrait éviter aussi les erreurs. Or, il ne faut pas confondre l’erreur et l’échec.

Le chien (comme l’humain, d’ailleurs), apprend souvent par essai et erreur. Empêcher l’erreur, c’est empêcher l’apprentissage. Attention, je ne vous dis pas de « planter » votre chien pour lui faire « une bonne leçon », au risque de le dégoûter, évidemment. Je dis juste que parfois, l’erreur, si redoutée, peut être notre meilleure amie, pour autant qu’on l’accepte sereinement.

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Prenons l’exemple simple du « pas bouger ». Pourquoi l’humain n’accepte-t-il pas l’erreur de son chien ?

  • Par incompréhension

Tintin : « Dis donc, tu te fiches de moi ? Hier, tu savais très bien faire, et aujourd’hui tu n’y arrives plus ? »

Milou : « Eh oui, le contexte a changé. Tu n’es plus au même endroit, alors pour moi, ce n’est plus le même exercice. » ou alors « Ben oui, mais avec les autres chiens autour, c’est vachement plus compliqué ! »

Parfois, on croit que le chien ne fait pas ce qu’on lui demande parce qu’il ne le veut pas, alors que, bien souvent, c’est parce qu’il ne le peut pas (il ne comprend plus car le contexte a changé, les critères sont devenus trop difficiles…). Pour un chien débutant, un « pas bouger » dans la cuisine et un « pas bouger » en pleine rue, ce n’est pas du tout la même chose !

  • Par insécurité

Tintin : « Pas bouger ! J’ai dit pas bouger, hein ! Tu restes. Tu attends. Tu bouges pas. Pas bouger ! »

Milou : « Ouh là, là, il a l’air de s’énerver alors que je suis assis. Ca doit pas être ça. Je vais faire autre chose ! »

Tellement peu sûrs de vous et de votre ordre, vous le répétez un million de fois, jusqu’à ce que le chien ait tellement de pression qu’il se relève.

  • Par fierté

Tintin : « Bon, tout le monde me regarde alors si jamais tu bouges, je vais être ridicule, t’as intérêt à bien te tenir ! »

Milou : « Ben dis donc, ce qu’il a l’air stressé quand il y a du monde ! C’est pas drôle, je m’en vais ».

Dans toutes ces situations, la bonne attitude aurait été de laisser faire l’erreur, puis de montrer au chien que ce n’était pas ce qu’on attendait de lui. Par exemple : tu restes assis, tu as une récompense. Tu te lèves, tu ne gagnes rien et on recommence, mais ce n’est pas un drame. Si on empêche systématiquement le chien de faire une erreur, il ne pourra jamais apprendre quel comportement on attend de lui. Si on sanctionne systématiquement l’erreur, le chien risque de perdre de la motivation et ne plus rien tenter.

Et plus on augmente la difficulté des exercices, plus la théorie est vraie. L’illustration parfaite est le slalom d’agility. Lorsque l’on veut un « vrai » slalom d’agility indépendant, il faut franchir le pas et arrêter de guider le chien. On va donc lui apprendre à passer tout seul deux piquets, puis quatre, etc, sans lui mâcher le travail. Bien sûr, cela implique que le chien va se tromper. Peu importe, il fera d’autres essais, et comprendra finalement quels essais sont récompensants pour lui et lesquels ne le sont pas.

Voici une petite vidéo (attention, il ne s’agit pas d’un tutoriel pour apprendre le slalom. Ce sont simplement mes entraînements filmés. Vous pourrez y voir comment on gère l’erreur dans un exercice complexe, et aussi que l’erreur fait partie intégrante de l’apprentissage). Pour Yéti, a règle est simple : tu réussis, tu es récompensée. Tu ne réussis pas, tu ‘as pas ta récompense et on recommence.

 

Beaucoup d’agilitistes n’arrivent jamais à avoir un slalom indépendant, car ils ne supportent pas que le chien puisse se tromper (pour toutes les raisons évoquées ci-dessus). Nous leur répétons à longueur de cours : « mais pourquoi tu as peur de l’erreur ? Au pire, il se trompe, et tu recommences. C’est pas la fin du monde ! » Mais c’est plus fort qu’eux. Au dernier moment, ils guident le chien, qui ne comprend donc jamais totalement ce qu’il doit faire et se contente de suivre les indications sans réfléchir…
D’autres encore sont à l’aise sur le slalom à main gauche, et pas à droite. Ils vont donc, jusqu’à la fin de leurs jours, préférer faire des acrobaties pour toujours se placer à gauche, plutôt que de travailler à droite et de risquer de se tromper. Qu’en concours, on assure ses arrières, c’est tout à fait légitime, mais l’entraînement est là pour faire des essais et des erreurs. C’est le moment où jamais de se tromper, pour pouvoir se corriger. Et personne ne les jugera ou ne leur rira au nez pour ça ! A bonne entendeuse…

En tant qu’éducateur canin, nous prenons souvent les chiens pour la base de l’apprentissage, afin qu’il comprenne les choses, avant de transmettre les connaissances et le savoir faire au maître. Nous sommes donc presque toujours confrontés à l’erreur du chien, qui ne comprend pas encore ce qu’on lui demande. Le premier réflexe des maîtres est souvent de ricaner, parce que « l’éducateur n’y arrive pas », ou de se sentir gêné pour lui. Mais nous, on n’est pas gênés du tout, parce qu’on sait bien que l’erreur fait partie du chemin vers la réussite.

Le mieux est d’accepter l’erreur et s’en servir comme d’un outil d’apprentissage (c’est le principe de base du shaping, pour ceux qui connaissent le clicker). Un chien qui apprend de ses erreurs est un chien qui apprend les conséquences de ses actes. Le comportement acquis sera donc mieux ancré et plus durable, car il sera compris et accepté, ça deviendra presque son choix. Tu t’es trompé, essaye encore, réfléchis, et je suis sûr que tu vas comprendre (quitte à ce qu’on baisse un peu les critères pour éviter une démotivation). Pour apprendre à marcher, il faut un jour lâcher les mains des parents et risquer de tomber. Et c’est souvent plus dur pour les parents que pour les enfants ! Mais si maman (ou papa) nous tient toujours la main, on ne fera jamais l’effort de chercher notre équilibre. Évidemment, notre maman (ou notre papa) n’est quand même jamais loin pour éviter qu’on se fasse mal. C’est ça, éduquer : responsabiliser tout en encadrant, en sécurisant, et sans dramatiser l’erreur.

Pour finir, voici une dernière citation d’Edison que j’aime beaucoup, très connue dans le monde anglo-saxon. Lorsqu’on lui demande s’il a connu beaucoup d’échecs avant d’inventer l’ampoule électrique, il répond : « I have not failed. I have just found 1000 ways that won’t work ». « Je n’ai pas échoué, j’ai simplement découvert 1000 solutions qui ne fonctionnent pas. »

Chaque erreur est une découverte qui nous fait avancer d’un pas vers la réussite… Et pour me venger de ne pas avoir trouvé le terme savant pour « la peur de l’échec », et faire un peu ma crâneuse quand même, je vous la fais en latin : « Numquam defectus, semper documento. » « Jamais un échec, toujours une leçon ». Au fait, tout ça est valable pour les humains aussi…

© Canissimo

Une réflexion au sujet de « Chouette, j’m’a trompé ! Ou accepter l’erreur pour éviter l’échec »

  1. Cramatte Ch

    « Jamais un échec, toujours une leçon »
    Le pas bouger, le pas sauter, le pas sentir est un non sens. Le chien n’agit pas en fonction d’une NON action. Il agit en fonction de son instinct, atavisme, éducation pourquoi pas..Lui apprendre à ne pas faire est idiot…Restons dans le positif..Donnons lui une consigne qu’il est capable de comprendre, d’exécuter.
    ChC

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